Défendre l’Occident, s’il existe encore, comme le voulait Henri Massis, ou se tourner vers l’Orient ? Une question plus actuelle que jamais, remarquablement traitée par Ego Non

13 commentaires pour “Défendre l’Occident, s’il existe encore, comme le voulait Henri Massis, ou se tourner vers l’Orient ? Une question plus actuelle que jamais, remarquablement traitée par Ego Non”

1. Ego Non est un esprit à la fois de méthode et de pédagogie mais aussi d’un singulière ampleur et d’une grande hauteur de vue. Cela semble un jugement convenu, mais en fait, cela correspond, le concernant, à l’exacte réalité. Des esprits de ce niveau sont rares merci à lui et à JSF qui nous a permis une fois 2 + 2 l’écouter.

   • Sans doute. Ego Non est un excellent vidéaste, très clair et d’une grande culture. N’oublions cependant pas que ses orientations politiques ne sont pas les nôtres. Pour ma part, je ne voudrais pas d’un ensemble politique européen, comme il l’appelle de ses vœux.

     • Pour ma part, je pense que nous devrions vous sentir et être capables de prendre, d’un analyste aussi de ce niveau, ce qui nous paraît compatible et même dans un rapport fécond avec nos propres convictions.
       Je pense aussi qu’il est faux de dire globalement que les orientations.d’Evo Non ne sont pas les nôtres. Nombre d’entre elles le sont, me semble-t-il.
       Enfin, sur la question européenne, je ne veux pas moi non plus du fédéralisme, ni bien sûr, d’un État européen d’ailleurs à mon avis, parfaitement impossible à mettre en place. Mais tout dépend de la définition qu’on donne au mot politique. Sauf à donner à ce terme un sens extrêmement réduit, par exemple « gouvernement des choses, le plus possible de coordination des nations d’Europe doit être recherché par les États, les peuples, et les diverses institutions, notamment culturelles du continent européen, Russie, comprise.

       • D’accord avec vous sur la curiosité intellectuelle, et Ego Non reste un vidéaste de très grande qualité que l’on gagne toujours à écouter. Je maintiens cependant que ses positions ne sont pas les nôtres : le projet politique qu’il a en tête est celui d’une fédération européenne (Russie exclue) où la France perdrait son indépendance. Une sorte de Saint-Empire européen en somme, et l’on sait que cette entité fut souvent hostile à la France. Ce projet n’est pas le nôtre, quoiqu’il ne manque pas de noblesse. Je suis même sceptique sur l’intérêt d’une coopération européenne tout court : l’Europe se meurt (regardez ses courbes démographiques), l’Amérique du Nord est exsangue, nos intérêts sont dans le Pacifique, dans l’océan indien, peut-être en Amérique latine, bref dans le monde qui va vivre ; coup de chance, nous y sommes présents.

2. Bien d’accord avec Anne, la hauteur de vue d’Ego Non est impressionnante. Une simple remarque; si je ne rentre pas dans le débat, à savoir si Guenon et l’Orient peut équilibrer la dérive matérialiste de l’occident, il ne faut essentialiser Dostoïevski ni voir dans ses critiques de l’occident matérialiste uniquement une résurgence d’un écrivain slavophile, ce serait dénaturer son œuvre et le caricaturer . Dostoïevski avec une lucidité impressionnante nous annonce la tentation wokiste et nihiliste 150 ans à l’avance. Par son génie il échappe à toute catégorisation, René Girard ni Camus ne s’y sont trompés. Loin de frayer le chemin à la révolution russe il a tenté de toutes ses forces jusqu’à la fin de de sa vie de la conjurer et de souhaiter de voir son pays y échapper et ne pas sombrer corps et biens à l’inverse de Tolstoï qui l’a quasiment justifiée en 1905 , si on croit une confidence de Tchekov. .Les disciples de Dostoïevski Soloviev ou Berdiaeff dans son appel à un nouveau Moyen – âge ont ouvert une voie féconde où l’Europe, qui prend aussi conscience de se son rôle d’apôtre de la liberté au nom d’une vraie conscience, enracinée dans son héritage, rejoignant ainsi Newman et bien aussi Kierkegaard. . Il sont donc été des facteurs puissants de rénovation de cet occident miné de l’intérieur par l’abandon progressif de sa foi chrétienne .Notons enfin que Chalamov, après _avoir connu et vécu dans ses os l’expérience la Kolyma rejette Tolstoï-par ailleurs si grand écrivain- dont il juge que l’œuvre et l »esthétique n’ont pas survécu à l’expérience de camps; En revanche Soljenitsyne, non seulement ne rejette pas Dostoïevski mais reste un prophète de notre renouveau, si on en croit Philippe de Villiers.

3. L’équation «Orient et Occident» ne relève pas exactement de considérations géographiques, géostratégiques ou géopolitiques mais culturelles et historiques. La «désorientation» intellectuelle remonte historiquement à la fin du Moyen Âge et, culturellement, à ce qui répond à l’appellation d’«humanisme», c’est-à-dire aux temps où, par raccourci de perspective, il est entrepris de placer l’humain au centre de l’univers – l’humanisme est la souche du matérialisme. Les données sont alors inversées ; par exemple, si, cosmologiquement (allons jusqu’à dire selon une «logique cosmique»), il est absolument rigoureux de considérer l’univers selon un point de vue géocentrique, au sens où c’est notre point de vue humain – et, donc, terrestre – qui est le seul auquel on puisse se placer en tant que ce nous sommes ; en revanche, il est tout à fait absurde de se contenter des aspects astronomiques réels d’après lesquels le «centre» serait le soleil (héliocentrisme), sauf à ne considérer que notre système solaire, évidemment, ce qui est un point de vue tout aussi légitime que le géocentrique… En somme, ce qui importe ce n’est pas telle ou telle autre réalité, mais le point de vue auquel on se place pour observer tel ou tel autre aspect des choses qui nous entourent. Or, le point de vue majeur est le nôtre, fatalement ; cela signifie donc que, ontologiquement, c’est le géocentrisme qui doit l’emporter toute autre conception cosmologique. Il devrait alors s’ensuivre que, selon le même raisonnement, ce que nous sommes est d’autant plus central, avec cette précision que, l’Homme n’étant pas ici conçu comme un objet périssable, il compte pour ce qu’il abrite une «idée» de la divinité, en que, selon saint Paul : «vous êtes un temple de Dieu car l’Esprit de Dieu habite en vous ?» Autrement exprimé, l’Homme ne saurait être «central» que dans la mesure ou en lui «habite» Dieu, c’est-à-dire que c’est bien Dieu qui est au centre de l’Homme. En d’autres termes, l’Homme ne saurait être situé où que ce soit dans l’univers, ni au centre, ni à la périphérie, nous pouvons dire qu’il est «à» l’univers et non «de» l’univers : «Soyez au monde mais ne soyez pas du monde» selon le résumé consacré des paroles de l’Évangile de Jean (XVII, 11-19), qu’il faut lire et relire en se plaçant au point de vue qui est précisément le mien, ici.
   Bref, c’est l’«humanisme» qui a fait l’Occident, au sens culturel, philosophique et politique. Les choses se sont précisées géographiquement, sans doute, mais, à l’origine du distinguo Orient-Occident tel que nous le concevons, il n’y a pas l’épaisseur d’un cheveu. Pour se faire mieux comprendre, au lieu du terme «occident», il conviendrait de dire «moderne». Si l’on consent à se pencher froidement sur l’évolution de la culture qui est la nôtre, on peut immédiatement s’apercevoir que, au départ, elle ne se distingue d’aucune autre en quoi que ce soit («Je ne suis pas venu abolir la loi mais l’accomplir», trouve-t-on dans Matthieu), et cela peut se démontrer pied à pied, jusques et y compris par la vulgaire analyse des faits, pour peu que l’on consente à les observer. Je me plais à donner en exemple la musique : celle d’Occident ne diffère en rien de celle d’Orient, jusqu’à la fin du Moyen Âge, quand les principes de ce que l’on appelle la «modalité» sont progressivement abandonnés jusqu’à obtenir les procédés du système appelé «tempéré» – qui est, d’ailleurs, acoustiquement faux, et tel, pour des raisons de simple commodité «tonale», encore que, quelquefois, ce ne soit pas si commode que l’on veut bien se l’imaginer, d’où, par exemple les instruments dits «transpositeurs» pour lesquels l’exécutant ne fait pas sonner ce que pourtant il lit sur la partition (?!?!?!). Tout cela a finalement conduit la musique devenue «occidentale» sur le seuil de deux écueils : le simplisme abrutissant de la «variété» et les complexités tout aussi abrutissantes des avant-gardes, qui en sont arrivés à nécessiter des explications textuelles infinies pour justifier à la cervelle des publics ce que leurs oreilles ne pourraient pas supporter d’entendre sans de telles explications alambiquées.
   Il n’y a aucune opposition «Orient-Occident» mais une animadversion congénitale de ce qui tend au «progressisme» pour tout ce qui entend s’en détacher.
   Mais les difficultés géopolitiques sont intervenues, afin de semer le plus grand trouble dans les réflexions. C’est cela qui empêche les «défenseurs de l’Occident» de comprendre ce qu’est fondamentalement ce à quoi ils aspirent, au fond, à savoir tout le contraire de ce qui brillent à leurs yeux, jusqu’à leur donner la berlue que ce serait d’or…
   C’est un peu comparable aux illusions des «Nationaux-Révolutionnaires», qui ont l’ambition de la Réaction tout en cédant constamment aux sirènes du Progrès ; c’est-à-dire que, intérieurement «de droite», ils combattent sur le seul terrain de «la gauche», jusqu’à consentir à se déclarer «Rouge-Brun», sans réaliser que c’est un strict pléonasme, d’ailleurs très simplement concentré dans l’uni-vocable politique «socialisme».
   L’intermédiaire «slave» doit pouvoir servir à ce que notre culture occidentalo-moderne trouve à mieux comprendre ce qui la perturbe, notamment avec l’intraitable Soljenitsine – dont «Le Chêne et le Veau» aurait dû depuis longtemps ouvrir tous les yeux sur les réelles perspectives – et l’«ultra-réactionnaire» Berdiaiev, apôtre d’un «nouveau Moyen Âge», comme on sait et comme par un fait exprès pour illustrer ce que je viens d’essayer de dire à peu près.
   Il n’est question que de la seule Beauté, dont Dostoïewski a prophétisé qu’elle «sauvera le monde».

4. Qu’est)ce que c’est que ça, « Ego non » ? Un homme, un groupe, une. association ?

   Jamais entendu parler… Il est vrai que les débats d’idées m’exaspèrent. Et il y en a trop désormais sur JSF !

   Il faut faire de la POLITIQUE?

   • Qu’est-ce donc, pratiquement, que «faire de la politique» ? Et, très précisément, en quoi cela serait-il moins exaspérant que «les débats d’idées» ?

   • Sur le fond, je suis assez d’accord avec vous. Mais comment s’y prendre ? Avec quels moyens ? L’AF peut-elle présenter des candidats aux élections législatives ? A défaut, peut-elle organiser un coup de force ?

5. D’après ce que je viens de découvrir sur Google, c’est un monsieur qui se prend pour quelque chose et qui, surtout, piquerait volontiers vos picaillons si vous vous abonniez à son site brumeux… Il cite Guillaume Faye ! Et l’on revoit la malsaine influence de « Nouvelle École » dans son propos…

   Il est vrai que l’AF invite de plus en plus des Alain de Benoist…

   • Si l’AF n’invite que des gens de son bord, elle n’invitera pas grand monde.

6. à Pierre Builly et à Grégoire Legrand :
   Je ne sais pas au juste si «l’AF invite de plus en plus des Alain de Benoist», mais ce que je sais pertinemment, c’est qu’il ne fau(drai)t pas le faire. Néanmoins et par exemple, Guillaume Faye – ayant, d’ailleurs, rompu assez tôt avec les séides au Benoist –, ce Faye-là, donc, tout insupportable doctrinalement qu’il eût été, se révélait parfaitement capable de «réviser» l’Histoire telle que se l’imaginait son confort intellectuel. Je me rappelle une conversation que j’eus avec lui, voilà 25-30 ans, au milieu de ses plus fidèles, conversation lors de laquelle il n’opposa rien à ce que je contestais de ses analyses ; tout au contraire, il recevait mes propos avec une espèce de grande joie «humaine» et «amicale»… Néanmoins, il n’appartenait certainement pas à la catégorie des gens qu’il faut inviter, mais à celle qu’il faut morigéner, et voilà bien le rôle de l’AF.
   Faire le coup de poing contre les animalcules et autres frelatés pagano-fachos du pseudo-«Fabrice Laroche» – soupirant après les grades universitaires et les rituels odiniques aussi gravement parodiques que crétins –, cela put valoir un peu ce que ça valait, mais il vaut bien mieux faire le «coup de POINT» ailleurs, et s’en prendre avec une radicale intolérance aux déviations intellectuelles que ces gaillards peuvent fomenter. Ces invitations de la part de l’AF, s’il y en a tant que cela, pourraient donner lieu à ces corrections intellectuelles, mais voilà, désormais, ces gens-là se sont mis à «attaquer» sur un terrain sociologique tellement élémentaire – pour ainsi dire «situationnisé» – que l’on ne peut que tomber d’accord avec eux. Seulement, il n’y a pas à débattre sur ce terrain. Tout «royalisme» est nécessairement spirituel, ou il n’est pas, sauf réduit à des simagrées décoratives, à l’exemple des «monarchies parlementaires». Notre royalisme propre est de France, il s’impose à nous comme expressément chrétien, d’où les formules, «Roi Très Chrétien», «Très Chrétien Franc Royaume de France», formules renouvelées par Louis XIII, qui fit vœu de consacrer le royaume de France, le roi et ses sujets à la protection de la Vierge Marie, et ce – s’il vous plaît, et qui plus est – par un texte législatif !!! C’est donc par là que nous en ferons prendre pour ses grades à la cohue des universitaires, maçons et autres diables des désordonnés cérémonials républicains.

   Quant à organiser un «coup de force», nous ne le pouvons décidément pas, depuis que le coup de poing (d’ailleurs, par trop universitaire, au fond), d’il y a tantôt cinquante piges, n’a notoirement pas rapporté une once de bénéfices «politiques», la preuve en étant que nous en serions arrivés à devoir écouter studieusement en «université d’été» les baveux avocats de la cause pagano-gaucho-facho, maintenant assortie d’anarcho-sympathie, à l’aigre-douce (rouge-brune) sauce Michel Onfray –
   Sacré-Cœur ! Chambord et drapeau blanc ! … s’il vous plaît.

   L’atmosphère «politique» est maintenant tellement sursaturée de stupidité que l’on ne peut plus la considérer autrement qu’au niveau du caniveau qui est le sien. Si bien qu’une espèce de «coup de Sirius» pourrait bien s’imposer à nous : observer tout ça «de haut». Mais ce serait vanité, rien que vanité et poursuite du vent que nous sommes individuellement. Alors quoi ? Eh bien, oui, s’en aller candidater ici et là, quelquefois, sur les listes que l’on pourrait intégrer et, tant qu’à faire, en les choisissant «stratégiquement».

   Sauf la déflagration socio-politique qui anéantira providentiellement toute cette décomposition morbide, nous ne pouvons politiquement espérer qu’en les plus terre à terre interventions et, en l’occurrence, aux plus terre à terre de toutes : les élections. Et, ainsi, tenter le «coup de talon» contre le fond de la fange du suffrage universel, pour rebondir.

7. Ce long débat, riche mais parfaitement chaotique, est amusant car il aura porté en grande partie, non pas du tout sur le sujet (un exposé sur un livre important d’Henri Massis) mais sur la question de savoir s’il faut ou non débattre avec des personnes extérieures à nos cercles (!) ou bien s’en tenir à débattre résolument et exclusivement entre nous, même si nous ne sommes pas parvenus hic et nunc – à être d’accord sur grand chose…
   Maurras qui a passé sa vie à chercher à mettre ses amis et les Français d’accord et tout aussi bien à débattre avec tout ce qui comptait de son temps serait étonné de la frilosité de ses successeurs. Se sentent-ils si inférieurs à la tâche qu’ils craignant la confrontation ? Il doit y avoir de ça !