
Par Jean-Marc Gonin, pour Le Figaro Magazine.
La question est posée dans ce portrait par Jean-Marc Gonin, paru dans Le Figaro Magazine et Figaro International du 11 septembre. Vint ensuite l’immense manifestation du 15 septembre à Londres. Ce qui est sûr, en tout cas, c’est la montée des réactions populaires face aux vagues migratoires massives voulues par les « élites » dominantes et la technocratie européenne. Les voilà mises en échec, ou à tout le moins contrariées, par les volontés populaires : ne pas mourir affirmer leur droit naturel à la continuité historique, Ce qui semblait inéluctable jusqu’à peu tend donc à s’inverser désormais. C’est une bonne et grande perspective, pas encore une victoire. JSF
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PORTRAIT – Figure du Brexit, le chef de file du parti Reform UK est porté par des sondages au beau fixe et un sentiment populaire de plus en plus hostile à l’immigration clandestine.

Nigel Farage n’a pas pour habitude de mâcher ses mots. Les 6 et 7 septembre derniers, lors du congrès de son parti Reform UK au centre de conférences de Birmingham, l’ancien agent de change, âgé de 61 ans, a déclaré qu’il incarnait « la dernière chance de remettre le pays sur les rails ». Pas moins.
Il faut dire que la conjoncture politique britannique l’a gâté. Les derniers sondages créditent son parti de 31 % des intentions de vote contre 21 % aux travaillistes et 18 % aux conservateurs. Des enquêtes d’opinion qui confirment les succès électoraux remportés lors des scrutins locaux du 1ermai dernier avec 677 sièges de conseillers de comté gagnés sur les 1 641 en jeu. En plus de cette embellie, Angela Rayner, vice-premier ministre du gouvernement Starmer, a dû présenter sa démission le jour même de l’ouverture du congrès de Reform UK. La figure du parti au pouvoir avait été rattrapée par une affaire d’impôts non payés sur une résidence qu’elle avait acquise.
La disgrâce de cette star du Labour, figure de l’aile gauche, a incité Nigel Farage à prophétiser le déclin rapide du parti du premier ministre. Alors que les prochaines élections à la Chambre des communes ne devraient intervenir qu’en 2029, celui qui est devenu leader virtuel de l’opposition (bien qu’il ne compte actuellement que quatre députés sur 650) table sur des législatives organisées dès 2027. Selon lui, la démission d’Angela Rayner va précipiter une scission à gauche entre l’aile modérée représentée par Starmer et ses détracteurs plus radicaux.
Mais au-delà des soubresauts du Labour, Reform UK bénéficie d’un puissant mouvement de sympathie en Grande-Bretagne. Il le doit notamment à l’explosion de l’immigration illégale, via des embarcations qui traversent la Manche depuis la France – alors que le Brexit prôné par Farage était censé redonner au Royaume-Uni le « contrôle de ses frontières ». En un an, les effectifs de sa formation seraient passés de 80.000 à 242.000. Un raz-de-marée.
Sa promesse : 600.000 clandestins expulsés en 5 ans
Adepte des mises en scène spectaculaires, Nigel Farage s’est fait photographier à Birmingham devant un faux tableau des départs d’un aéroport annonçant l’embarquement immédiat d’immigrés illégaux vers leurs pays d’origine (Afghanistan, Érythrée, Iran, Syrie, Soudan…). C’est le point focal de son programme de gouvernement : il se fait fort d’expulser 600.000 clandestins en cinq ans. Déjà, sous la pression de manifestants brandissant des drapeaux britanniques devant des hôtels réquisitionnés pour loger les demandeurs d’asile, le gouvernement a dû reculer. Ces immigrés seront désormais hébergés sur des bases militaires. Une victoire pour Farage.
Reform UK bénéficie d’un puissant mouvement de sympathie en Grande-Bretagne. Il le doit notamment à l’explosion de l’immigration illégale, via des embarcations qui traversent la Manche depuis la France
Émule de Donald Trump, il promet aussi de congédier toute la caste des hauts fonctionnaires pour les remplacer par des personnes « compétentes » et « sans idéologie ». Lors d’un récent voyage à Washington, Nigel Farage a expliqué qu’à l’instar de l’actuelle Administration américaine, il créerait un département à l’efficacité gouvernementale (DOGE) comme celui dont Elon Musk avait hérité. Mais, dit-il, à la différence de ce qui s’est passé aux États-Unis où l’action du milliardaire a été vite stoppée, le DOGE britannique irait jusqu’au bout car à Londres, une majorité parlementaire ne peut être entravée par la Constitution.
Best-seller du congrès de Birmingham, un maillot de football bleu turquoise floqué à l’avant du mot Reform UK exhibe dans son dos le nom de Farage et le numéro 10. 10 comme les légendes du ballon rond et meneurs de jeu Pelé, Maradona, Zidane, et 10 comme le 10 Downing Street, résidence du premier ministre. Nigel Farage est prêt à commander le camion de déménagement. ■ JEAN-MARC GONIN