
Par Eric de Mascureau.
Cet article est paru le 28 octobre dans Boulevard Voltaire. L’auteur, en conclusion, explique l’étonnante omission de J. D. Vance par une volonté personnelle de rester maître de ses choix et fier de ses valeurs. Eh bien, nous trouvons cela très respectable à l’heure où, dans ce qu’on appelle encore l’Occident, les « élites » dirigeantes ne songent qu’au reniement de nos origines, quand elles ne les combattent pas. Les Juifs, quant à eux, savent fort bien défendre les leurs et nous en donnent un exemple à suivre. C’est ce qu’a fait J. D. Vance, et cela nous paraît fort bien. ■

À Jérusalem, chaque pas est un voyage à travers les âges et à la rencontre des grandes religions monothéistes. C’est dans ce décor où chaque pierre et chaque ruelle témoignent d’une histoire millénaire que le vice-président américain J.D. Vance a effectué une visite aussi symbolique que politique. Placé sous le signe de la paix et de la foi, ce déplacement a surpris par un choix singulier : celui de visiter le Saint-Sépulcre sans se rendre au Mur des Lamentations.
Un pèlerin américain
C’est le 23 octobre 2025 que J.D. Vance s’est rendu dans la vieille ville de Jérusalem, à l’occasion d’une mission diplomatique visant à soutenir la trêve fragile entre Gaza et Israël. Après avoir rencontré des responsables israéliens, notamment le Premier ministre Benyamin Netanyahou, le vice-président a souhaité accomplir un acte de recueillement personnel au sein de l’un des lieux les plus saints du christianisme.
Il a ainsi assisté à une messe privée dans l’église du Saint-Sépulcre, que la tradition chrétienne identifie comme le site de la crucifixion, de la mise au tombeau et de la résurrection du Christ. Lors de sa visite, Vance s’est également recueilli devant la Pierre de l’Onction où, selon la tradition, le corps de Jésus fut préparé avant son ensevelissement.
Sur X, il a commenté cette visite avec une certaine émotion : « Quelle bénédiction extraordinaire d’avoir visité le lieu de la mort et de la résurrection du Christ ! Je suis infiniment reconnaissant aux prêtres grecs, arméniens et catholiques qui prennent soin de ce lieu sacré. Que le Prince de la Paix ait pitié de nous et bénisse nos efforts pour la paix. » Cette visite est loin d’être anodine, car elle illustre le cheminement spirituel et personnel du vice-président, converti au catholicisme et baptisé en 2019.
Le site de la Passion et de la Résurrection
L’église du Saint-Sépulcre, située dans le quartier chrétien de la vieille ville de Jérusalem, est considérée comme le lieu le plus sacré du christianisme. Ce sanctuaire est également le fruit d’une longue histoire. Au début du IVe siècle, l’empereur Constantin le Grand fit construire une basilique sur les lieux identifiés par sa mère, sainte Hélène, comme ceux de la Passion du Christ. L’édifice fut consacré en 335, marquant la naissance d’un centre de pèlerinage pour les chrétiens du monde entier.
Cependant, le Saint-Sépulcre dut affronter, au fil des siècles, de nombreux incendies ainsi que les ravages des guerres et des rivalités religieuses. En 614, la basilique fut partiellement incendiée lors de l’invasion perse, marquant le premier grand drame de son histoire. Ensuite, en 638, la ville passa sous domination musulmane, mais le nouveau pouvoir respecta les grands édifices chrétiens et en permit la préservation. Cette tolérance, toutefois, ne dura pas. En effet, en 1009, le calife Al-Hakim bi-Amr Allah ordonna la destruction totale du sanctuaire, provoquant un immense émoi dans toute la chrétienté. Reconstruit dès 1048 grâce à un accord entre l’Empire byzantin et les autorités musulmanes, le Saint-Sépulcre devint néanmoins le symbole d’une foi meurtrie. Cet épisode tragique contribua à nourrir l’élan des croisades. Après la conquête de Jérusalem en 1099, les croisés entreprirent d’embellir et de réorganiser l’édifice, lui donnant en grande partie son apparence actuelle : un ensemble complexe de chapelles, de cours et de sanctuaires superposés.
Aujourd’hui, le Saint-Sépulcre est géré conjointement par trois confessions chrétiennes : catholique, grecque-orthodoxe et arménienne. Cet équilibre, régi depuis 1852 par un arrangement appelé le « Statu Quo », constitue, malgré certains différends, un rare exemple de coopération œcuménique entre plusieurs familles du christianisme.
Le Mur des Lamentations : vestige d’un peuple dispersé
À quelques pas de là, le Mur des Lamentations, ou Kotel, se dresse dans le quartier juif. Il constitue le dernier vestige du Second Temple de Jérusalem, édifié par le roi Hérode le Grand vers 19 av. J.-C. et détruit par les troupes romaines de Titus en l’an 70. Dès lors, les fils d’Abraham, d’Isaac et de Jacob furent dispersés à travers le monde. Le mur, haut de vingt mètres et long d’environ cinquante, est tout ce qu’il reste, aujourd’hui, de l’esplanade du Temple. Les Juifs du monde entier viennent y prier, déposer des billets dans les interstices de ses pierres, pleurer la destruction du sanctuaire et les souffrances passées de leur peuple.
Que J.D. Vance n’ait pas choisi de s’y rendre suscite donc des interrogations. Traditionnellement, les dirigeants étrangers visitant Israël s’inclinent devant ce monument millénaire du peuple hébreu. En omettant ce passage symbolique, le vice-président a peut-être voulu conférer à son voyage une portée personnelle autant que politique, rappelant qu’à l’image de l’Amérique, il entend rester maître de ses choix et fier de ses valeurs. ■














Très bien !!!
Shlomo Sands rappèle dans « Comment la terre d’Israël fut inventé » que le Mur des Lamentations ne faisait pas partie du Temple mais de la muraille d’une cité et n’avait jamais été honoré avant le XVII siècle. JD Vance est peut être au courant de cette thèse.
J D VANCE a sans doute bien retenu la leçon d’un de ses professeurs: René GIRARD