Les Lundis.
Par Louis-Joseph Delanglade*.
Peut-être s’est-il exprimé parce que M. Trump s’était montré en paroles et en actes peu amical pour un allié – sans même parler du comportement quasi hostile d’un autre prétendu allié de l’Otan, M. Erdogan, qui s’est entendu en solo successivement avec MM. Poutine et Trump. L’important reste que, vu la gravité de la situation, M. Macron aura, dans l’entretien accordé à The Economist (7 novembre), fait preuve tout à la fois d’une grande lucidité sur l’Otan et d’une inconséquence certaine sur l’Union européenne.
Inutile de reprendre ici tous les griefs qu’on peut faire à l’Otan, cette organisation qui, on le sait maintenant après déclassification d’archives soviétiques puis russes, a largement surjoué la guerre froide pour justifier sa propre existence puis refusé de disparaître en même temps que le Pacte de Varsovie en 1991. C’est que l’Otan est depuis le début un instrument d’assujettissement de l’Europe (d’abord essentiellement « occidentale »), une Europe veule, apeurée et fatiguée de sa propre Histoire. La preuve par l’absurde est que son seul titre de gloire, sa seule opération militaire depuis sa création en 1949, aura consisté à bombarder la Serbie en 1999, pour complaire à l’humanitarisme islamo-kosovar de M. Clinton et en violation de ses propres statuts puisqu’aucun de ses membres n’était menacé.
M. Trump, qui reste avant tout un homme d’affaires, pense avec quelque raison que l’Otan a au fond toujours reposé sur un « deal » ( M. Macron parle d’une « ombrelle géopolitique » en échange d’une « exclusivité commerciale »), « deal » qui coûterait désormais plus cher aux Etats-Unis qu’il ne leur rapporte. On ne peut d’ailleurs que l’approuver quand il déclare l’Otan « obsolète » depuis la disparition de l’Union soviétique. M. Macron a bien compris le message et du coup se montre dubitatif sur l’article 5 du Traité de l’Atlantique-Nord qui garantit une solidarité militaire sans faille à tout membre de l’organisation victime d’une attaque.
Mais voici donc notre bonne vieille Europe « au bord du précipice » (c’est toujours M. Macron qui parle) : parce que son « grand allié » risque de lui faire défaut ; parce qu’elle n’est qu’« un marché », non « une communauté » ; parce qu’elle est faible face à « l’émergence de la Chine » et au « retour des puissances autoritaires » (comprendre : la Russie, la Turquie et d’autres). Contre le risque avéré d’une disparition géopolitique, il convient, pense-t-il de reconstituer une « Europe puissance » laquelle passe par la « souveraineté militaire » et le « dialogue avec la Russie ».
Tout cela est bien dit mais mais se heurte à la dure réalité – celle de la nature même de l’Union européenne avec laquelle manifestement M. Macron confond l’Europe. Mme Merkel en effet, d’accord avec M. Stoltenberg (secrétaire général de l’Otan), a immédiatement rejeté son analyse et ses conclusions (« un jugement intempestif », « des termes radicaux »). C’est qu’elle ne veut pas mettre la main au porte-monnaie et s’acharne à croire en la pérennité du « deal » euro-américain pour continuer à vendre en paix ses produits haut de gamme. L’Europe (entendez « L’Union européenne ») n’aurait d’ailleurs, selon le parti atlantiste, ni les moyens (ce n’est pas si sûr), ni la volonté (cela, c’est certain) de se passer des Américains. Ce sont les dominants qui décident : si l’Otan est en état de « mort cérébrale » du fait même des Etats-Unis, les propos de Mme Merkel, représentante de l’Allemagne, constituent un « nein » définitif à toute velléité de puissance européiste.
Nous savons depuis longtemps déjà que l’Union européenne ne s’alliera jamais avec la Russie car les pays d’Europe centrale, orientale et nordique lui sont hostiles. Nous savons maintenant que l’Union européenne ne se détachera jamais d’elle-même de la tutelle des Etats-Unis d’Amérique car l’Allemagne ne le veut pas. C’est ainsi. On pourrait donc rappeler M. Macron à l’évidence : puisque l’U.E. n’est qu’une impasse, la France encore souveraine peut prendre l’initiative, par exemple tenter un resserrement des liens avec la Grande-Bretagne en (bonne) voie de Brexit et un rapprochement avec une Russie que l’Union maltraite à tort depuis des années. Après tout, il s’agit des deux puissances européennes qui, avec elle, comptent encore sur le plan militaire. ■
* Agrégé de Lettres Modernes.
Retrouvez les Lundis précédents de Louis-Joseph Delanglade.
© JSF Peut être repris à condition de citer la source
Et pourquoi pas le carré d’AS ( les adversaires diraient bande des4) avec la France, le Royaume Uni, la Russie et les USA.
Ces 4 là disposent de la supériorité nucléaire en MEGA tonnes et non en KILO tonnes comme les petits de la classe ( Chine, Inde, Israël, Pakistan, Corée du nord) et un droit de véto au conseil de sécurité de l’ONU ( garantie d’impunité ) et ce groupe pourrait mettre de l’ordre sur cette fichue planète. en assurant la tranquillité.et la paix par obligation
Ce qui est exceptionnel dans la formation maurrassienne, c’est que sur les grands dossiers, nous avons une totale harmonie de pensée. Cela doit bien faire 40 ans que, pour dix mille raisons que je regrette et qui tiennent aux cours différents de nos vies, je n’ai plus échangé et je n’ai plus revu mon vieux camarade Louis-Joseph Delanglade. Mais, cher J. D. si tu peux savoir combien tes propos du lundi me semblent toujours impeccables et totalement similaires aux miens…!
Et celui-ci, comme toujours…