LE PÉRIL ANGLOBALISTE (1)


PAR RÉMI HUGUES.     

En pleine première vague de la pandémie de Covid-19, l’ex-Premier ministre travailliste britannique Gordon Brown avait proposé comme réponse politique à la crise sanitaire l’instauration – à titre provisoire – d’un gouvernement mondial[1]. Cette pandémie étant planétaire, le virus n’ayant pas besoin de passeport pour circuler à travers les frontières (dixit Macron), la solution devrait donc, selon le successeur de Tony Blair au 10, Downing Street, se situer à la même échelle : transnationale, globale.

Ne croyez pas que l’impérialisme britannique a disparu avec le mouvement de décolonisation qui commença dans la seconde moitié du XXe siècle et la déconfiture de Suez, en 1956-1957. Il a changé de forme, se dissimulant derrière les États-Unis. Il s’efforce en effet d’en aiguiller les grandes orientations géostratégiques[2]. Avec un atout non négligeable : une langue commune, et, son corollaire, une façon de pensée similaire.

Global Britain, dernier avatar de la politique du Grand Jeu

Depuis le XIXe siècle, le monde vit sous le joug du même impérialisme linguistique. L’imperium de l’anglais est l’une des conséquences notables du nouvel ordre international né de Waterloo. Il a favorisé l’essor d’une culture hégémonique dite anglo-saxonne, ou globale, dont le centre de diffusion principal est aujourd’hui la Californie (Hollywood, Silicon Valley). Et les élites britanniques entendent bien exploiter à fond cet état de fait caractérisé par le rayonnement planétaire de leur langue.

Le Brexit, décidé démocratiquement en juin 2016, a été l’occasion pour l’establishment, qui se concentre autour de la City de Londres, de redéfinir la place du Royaume-Uni dans le monde. Le syntagme « Global Britain » désigne cette nouvelle stratégie, initiée par Theresa May et poursuivie par Boris Johnson.           

En matière économique, le but est d’attirer les capitaux, d’être le terrain de jeu idéal pour les entrepreneurs, de capter l’essentiel des flux financiers et des « cerveaux ». En langage plus médiatique, il s’agit de réformer, de moderniser le pays, de le transformer en « Singapour-sur-Tamise ».

Au niveau diplomatique et militaire, la France a réalisé à l’automne dernier que le « Global Britain » ne peut que se déployer qu’au détriment de ses intérêts. L’AUKUS, annoncé le 15 septembre 2021 par Joe Biden a été pour nous un vrai coup dans le dos, pour reprendre les mots du patron du Quai d’Orsay Jean-Yves Le Drian, qui ce jour-là a appris à ses dépens cette cruelle réalité : ils nous voient comme des vassaux, pas comme des alter ego.

L’on peut que déplorer que ces derniers mois les relations franco-britanniques se sont dégradées, voire tendues, à cause en outre de la question des licences de pêche dans la Manche et des problèmes migratoires sur cette zone, que les accords du Touquet sont censés régler.

Dans Kiel et Tanger, Charles Maurras interpella ses contemporains sur le rapport asymétrique qui caractérise l’« alliance » entre le Royaume-Uni et la France :

« Cette union de fait ne ressemble guère à une alliance dans laquelle on voit deux États contracter pour se mouvoir ensemble. Ici l’un est moteur, l’autre est simple mobile et simple protégé. […] La République ne manœuvre plus, mais sera manœuvrée et manipulée par un cabinet étranger. Elle ne fera plus ni combinaisons ni systèmes, mais elle sera d’un système et d’une combinaison : système anglais, combinaison dont la mise en train et la direction lui échappent. »[3]

Il y a lieu de considérer que ces observations ne sont en rien datées. En vérité le régime républicain en France sert les intérêts britanniques. C’est dans ce cadre institutionnel que l’establishment du Royaume-Uni peut le plus aisément placer ses hommes-liges.

Suffrage universel et ingérence étrangère 

Effectivement, « quand, à la suite d’une révolution ou d’une autre, l’État ne tient qu’à l’opinion mobile et à la volonté flottante de citoyens éphémères, il devient le jouet d’intérêts particuliers factieux, que l’or étranger domestique facilement »[4], fit remarquer Maurras dans Kiel et Tanger.

N’oublions pas les sommes colossales versées par les donateurs londoniens au candidat Emmanuel Macron pour financer sa campagne de 2017.

Son rival François Fillon, qui plaida en faveur d’un rapprochement avec la Russie, vit surgir d’innombrables affaires qui lui barrèrent la route de l’Élysée.

Son prédécesseur, François Hollande, avait déclaré en février 2012 au Guardian que les milieux financiers ne devaient pas le voir comme un danger, ce qui lui valut cette remarque sarcastique du président d’alors Nicolas Sarkozy : « Mitterrand à Paris, Thatcher à Londres »[5].

Ce dernier, surnommé Sarkozy l’Américain, qualifié par ses adversaires de néoconservateur américain à passeport français, n’était pas en reste. Le 16 janvier 2009, il fit allégeance au projet « anglobaliste » d’instauration d’un gouvernement planétaire, en précisant qu’« on ira ensemble vers ce nouvel ordre mondial et personne, je dis bien personne, ne pourra s’y opposer »[6].   ■  (À suivre)


[1]https://www.theguardian.com/politics/2020/mar/26/gordon-brown-calls-for-global-government-to-tackle-coronavirus

[2]C’est la logique de Nassau, en référence à la capitale des Bahamas où le 21 décembre 1962 furent conclus par Kennedy et MacMillan les accords de Nassau, qui scellaient l’alliance renouvelée entre les États-Unis et le Royaume-Uni. Les Britanniques concèdent la prééminence de l’ancienne colonie non sans arrière-pensées, qu’Alexandre Adler résume ainsi : « Il faut maintenant passer le témoin aux États-Unis. Mais seuls, les Américains n’y arrivent pas parce qu’ils ne sont pas assez malins. Et heureusement nous avons encore, nous les Britanniques, nous avons encore toute notre tête et nous avons des individualités exceptionnelles qui, grâce à cela, conduisent l’Amérique sur le chemin du bien et de vrai. », https://www.youtube.com/watch?v=R87aYafgxa0. Voir aussi : Vernant Jacques, « La logique de Nassau », in : Politique étrangère, n°6 – 1962 – pp. 507-515.

[3]Charles Maurras, Kiel et Tanger 1895-1905 La République française devant l’Europe, Marseille, Belle-de-Mai Éditions, 2021, p. 240.

[4]Ibid., p. 419.

[5]https://www.lepoint.fr/presidentielle/sarkozy-vs-hollande-comment-faire-de-la-caricature-avec-du-flou-20-02-2012-1433369_3121.php

[6]https://www.elysee.fr/nicolas-sarkozy/2009/01/16/declaration-de-m-nicolas-sarkozy-president-de-la-republique-sur-les-priorites-et-defis-de-la-politique-etrangere-de-la-france-a-paris-le-16-janvier-2009


À lire de Rémi Hugues Mai 68 contre lui-même (Cliquer sur l’image)

 

 

 

© JSF – Peut être repris à condition de citer la source

 

2 commentaires pour “LE PÉRIL ANGLOBALISTE (1)

  1. La cession de la partie énergie d’ALSTOM à GE, concoctée par le ministre Emmanuel MACRON, imposée, le couteau sous la gorge à Patrick KRON et à Frédéric PIERRUCCI, était bel et bien la contrepartie exigée pour l’élection d’Emmanuel Macron : montée comme une opération de la CIA cet acte de piraterie aura marqué l’entrée officielle de la France dans le club mondial des « républiques bananières ». Mais en vertu de cette règle du « en même temps », nous avons vérifié qu’« un train peut en cacher un autre ». En effet, après qu’ALSTOM ait été réduite dans la discrétion à un train, un deuxième train de contreparties n’a pas tardé à s’annoncer propulsé par une industrie pharmaceutique, plus puissante que les industries de la défense, et dont les dizaines de milliards de dollars d’amendes payées pour fraude et corruption font partie de son modèle économique. Il était évident que l’arrivée providentielle d’un nouveau virus imposait de dégager à la hussarde les obstacles sur la voie des revenus sûrs et réguliers que des vaccins pouvaient procurer, bien qu’il n’y ait eu aucune pertinence à un tel choix. D’où le blocage des possibilités de traitement parmi un assortiment de mesures propres à engorger les hôpitaux et à récompenser le classement covid d’un maximum de patients afin de paniquer la population par une propagande amenant à l’acceptation d’un gradient de contraintes bien ajusté. Pour mieux comprendre, il peut être utile et distrayant de se référer à Dr KNOCK (1923) et à l’épisode de la guerre des mondes improvisé à la radio en 1938 par Orson WELLS.

  2. Votre raisonnement sur Alstom est séduisant. Il omet même le rôle de Mr Jerome Pecresse homme discret derrière Mr P. Kron. La suite concernant « le virus providentiel qui permet à des capitaux faramineux obtenus par l’industrie pharmaceutique par fraudes et corruptions évidemment, de s’imposer à la hussarde », me séduit moins. Ce virus était totalement inattendu quoiqu’on en dise. Il s’en prenait à tous indifferemment comme le cancer, puissants comme misérables. Trouver une solution vaccinale ou médicamenteuse ne se faisait pas sur une table d’arrière cuisine. Il a fallu 10 ans à cette « indusrrie corrompue » pour trouver une thérapie au SIDA et le vaccin est encore inconnu, et pourtant , Dieu sait si le lobby homo est puissant. Autour de ce processus de recherche et tatonnements inéluctables, , les commentaitres allaient bon train et celà est normal ( souvenons nous de l’affaire Naessens !) car le virus est particuliérement diabolique .
    Que l’Etat profite de cette pandémie pour asseoir son pouvoir, aliéner nos libertés , contrôler nos economies , cela est de bonne guerre !… L’Homme trouvera bien un moyen de pallier cet asservissement. Mitterrand avant de mourir a dit:  » Je crois à la victoire de l’Esprit » . JM Le Pen de son coté:  » Le Diable même porte pierre ! » et Maurras:  » Le desespoir en politique est une sottise absolue ». Jean Paul II:  » N’ayez pas peur ! » …

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