
Par Pierre de Meuse.

Mais Macron n’est pas le seul à pratiquer la fuite en avant. Les principaux dirigeants actuels de l’Union Européenne manifestent clairement leur désir de voir la guerre d’Ukraine continuer, soutenant à fond la position de Kiev, qui s’est traduite par des préalables totalement inacceptables par la Russie, à savoir le retrait exigé des troupes russes avant toute discussion sur une paix éventuelle, et proposant un cessez-le feu inconditionnel pour au moins un mois en attendant ce développement improbable.
D’autre part, Macron, Merz et von der Leyen réclament la suppression de la règle de l’unanimité dans l’Union, ce qui équivaudrait à transformer l’Europe en un État fédéral, privant totalement de leur souveraineté tous les États petits ou moyens qui le refusent, mais aussi les grands, France, Allemagne, Italie et Espagne, du moins si l’un d’entre eux voulait ralentir le processus.

Pour rendre obligatoire ce sens unique, et avec le soutien de la Grande Bretagne, le trio a mis sur pied un plan d’action visant à museler toute opposition en restreignant les libertés des récalcitrants sur leur territoire, mais aussi à multiplier les ingérences et même les fraudes dans les pays de la périphérie comme la Roumanie, la Hongrie, la Slovaquie, la Pologne ou la Tchéquie. Ce programme, développé sans état d’âme par Thierry Breton, a commencé à être appliqué, malgré les résistances, utilisant les services d’une magistrature décidée à user sans vergogne d’un parti-pris de conviction. Annulation des élections, décisions d’inéligibilité, mise sous surveillance des partis contestataires, interdiction des réunions, information falsifiée par une presse encadrée jusqu’à la minutie, amendes assassines, fermeture des comptes bancaires sont exécutées quotidiennement tandis qu’un narratif digne du Big brother d’Orwell nous est imposé sur les écrans.

Et tout cela se fait en imposant une grille idéologique de plus en plus impérative, digne d’un État totalitaire, celui de « l’extrême centre ». Quelle idéologie face à la « dictature de Poutine » ? Contre un régime défendant la vénération du passé, la défense de la famille, le respect de la religion et de l’héroïsme, le trio prétend défendre les valeurs de la « démocratie idéologique » : libertarisme sociétal, individualisme total, libéralisme économique, globalisme généralisé, négation des identités nationales, culturelles, ethniques, immigrationnisme, rupture avec le passé, tout cela couplé à un conformisme apparemment contradictoire, une morale laxiste, mais omniprésente, et imposant aux contrevenants des sanctions de plus en plus lourdes. Et tout cela assorti d’un mépris sans borne pour les peuples historiques qui composent l’Europe. Un mépris qui peine à cacher son origine de classe, adressé aux « populistes » par les membres d’une oligarchie de plus en plus riche, dénationalisée, face à une plèbe de plus en plus pauvre.
Bien entendu, cette domination est fragile, car la classe politico-médiatique est totalement discréditée, et elle est aussi incapable d’imaginer autre chose. Alors elle se sert de la peur qu’elle fabrique à travers la politique extérieure aventureuse qu’elle a conçue, de la même manière qu’elle avait choisie avec les épidémies plus ou moins inventées pour sa marche en avant vers un pouvoir qu’elle espère plus assuré, celui de l’Europe fédérale. En résumé, la convergence de la politique macronienne et de celle de Merz et von der Leyen représente la réalisation chimiquement pure d’une identification totale de l’intérieur et de l’extérieur, c’est-à-dire l’inverse de l’enseignement capétien. C’est logique pour une vision de l’Europe considérée comme une simple modalité de la mondialisation. Mais c’est aussi une gigantesque rodomontade car le rapport de force est devenu défavorable. Il convient ici de rappeler le propos de Bainville : « Ce qui est dangereux et haïssable, c’est le simulacre de l’action. » Certes, il est préférable de ne rien faire que de se lancer dans des actions désastreuses, mais la gesticulation menaçante sans moyens véritables inflige toujours les pires humiliations.

Ainsi le chancelier Friedrich Merz lors de sa visite à la Maison Blanche a demandé au président américain de se montrer plus contraignant à l’égard de la Russie, et de manifester son soutien de manière plus claire à l’Ukraine, afin de mettre fin au conflit conformément à « l’état de Droit ». Croyant être habile, il a rappelé à cette occasion l’anniversaire du 6 juin 1944, celui du débarquement en Normandie qui avait « débarrassé l’Europe du nazisme », un bienfait dont il l’en remerciait chaleureusement. Malheureusement pour lui, la réponse ne fut pas celle qu’il attendait. Trump, en effet, a refusé de réaffirmer son soutien à l’Ukraine, comparant la guerre du Donbass à une « chamaillerie puérile » dans laquelle il ne voulait pas mettre les mains. Pire encore, feignant d’ignorer la posture amicale du chancelier, qui se mettait du côté des vainqueurs de son propre pays en célébrant le débarquement, il s’est exclamé :« Ce n’était pas un bon jour pour vous », puis a répété sa phrase en éclatant de rire, solidarisant ainsi de façon facétieuse, mais outrageante le chancelier allemand et le régime hitlérien. Il est donc clair que les espoirs de voir se reformer la solidarité otanienne risquent fort d’être déçus tant que le locataire de la Maison blanche restera en place. Du reste, à la dernière réunion de Ramstein, où sont coordonnés les fournitures militaires de l’OTAN à l’Ukraine, le responsable américain était absent, non représenté et avait même refusé d’y participer par visio-conférencz. La guerre va donc continuer, sans l’Amérique.
Conclusion

Nous constatons que l’Europe connaît une crise grave et que, dans cette crise, la France va plus mal que les autres pays du continent. La république a cependant entrepris une aventure internationale pour résoudre ses problèmes intérieurs par la désignation d’un ennemi qui ne menace en rien ses intérêts. Cette aventure risque de nous coûter très cher et d’être fatale pour elle, et peut-être pour la France elle-même. Pourquoi ? Parce que, si la Russie gagne cette guerre dans laquelle elle lutte pour son existence en tant que grand État, et même si nos peuples, par chance, ne participent pas à la guerre, les gouvernements européens et l’union européenne, ainsi que l’idéologie qui la parasite seront considérés comme vaincus, décadents et paralysés par un système nocif. Et s’ils y participent, ce qu’à Dieu ne plaise, vainqueurs ou vaincus connaîtront des maux et des misères oubliés depuis bien longtemps. Bainville, encore lui, écrivait en juin 1931 : « On dit aujourd’hui que la guerre n’est plus possible (…). Il est souverainement imprudent de le dire. Il est encore plus grave de le croire. »
– Il faut savoir que le temps où les États pouvaient perdre les guerres sans remettre en cause les régimes qui les dirigeaient est révolu depuis un siècle.
– En effet, l’échec, quand il est patent et catastrophique, ne suscite plus la fidélité au pouvoir. Les peuples ont besoin de responsables à incriminer et préfèrent rejeter la faute sur eux que reconnaître leur indolence.
– Nous ne pleurerons pas les institutions de la Vème république, encore moins les « valeurs républicaines », ni le personnel politique qui a fait la preuve de son incompétence et de sa partialité. Cela dit, le naufrage que préparent nos gouvernants nous infligera des souffrances dont nous n’avons pas idée.
– C’est pourquoi il est capital qu’un courant de pensée rende public un autre témoignage : afin que ce qui reste de la France ne soit pas définitivement compromis dans un projet suicidaire. À ceux qui estimeraient que c’est un rôle de figurant que le siècle nous laisse, nous répondrons qu’il est préférable de figurer plutôt que de n’être pas.
Terminons encore avec une citation de Jacques Bainville :
« Il faut vouloir les conséquences de ce que l’on veut ou subir les conséquences de ce que l’on subit ». Après deux siècles de vacance du politique, nous en sommes là. ■ PIERRE DE MEUSE (FIN)
Derniers ouvrages parus



Fin de cette suite ; je l’avais trouvée remarquable au début et je le confirme après lecture de cette troisième partie.
Pourquoi ne pas la mettre à disposition des lecteurs de JSF en un seul document ?
Ce serait utile, je crois.