Sous le titre: « Une policière: « J’ai évité le pire à Villiers-le-Bel », Christophe Cornevin a recueilli le témoignage d’Helène, 25 ans, gardien de la paix, qui a retenu le geste d’un collègue qui voulait utiliser son arme de service (1).
Le Figaro: Pouvez-vous décrire ce lundi noir pour les forces de l’ordre?
Helène: Vers 18h30, nous avons reçu l’instruction de porter secours à des collègues qui se faisaient caillasser et recevaient des coktails Molotov dans la cité. A une vingtaine, nous courions avec nos casques et boucliers. On avait reçu l’autorisation de tirer au flash-ball et au lance-grenades, j’avais une lampe-torche, je tentais d’éclairer les cibles. Soudain, une voiture de police a brûlé à mes côtés. Cela courait dans tous les sens, les pavés volaient. Les voyous nous visaient avec des fusées de détresse aveuglantes qui s’écrasaient dans un vacarme assourdissant. Des collègues tombaient blessés autour de nous. Dès le dimanche, c’était déjà chaud bouillant. Un parpaing avait explosé le pare-brise d’un collègue. On savait que cela allait tourner au vinaigre le lendemain.
L.F: Où étaient les émeutiers?
H.: Plusieurs dizaines étaient à une quinzaine de mètres à peine quand deux grenades lacrymogènes les ont dispersés. Soudain, j’ai entendu claquer des détonations. Quatre de mes collègues se sont écroulés en même temps. Je me suis retrouvée seule et j’ai récupéré un bouclier pour ne pas devenir une cible. Nous avons reculé pour protéger nos blessés. Peu après, un tireur embusqué dans un buisson, peut-être le même, nous a tirés comme des lapins tandis que le déluge de projectiles continuait. Les voyous voulaient, vraiment, tuer un flic…..
L.F: Le pire a alors été évité…
H: Certainement. A l’angle d’un mur, un inconnu nous tire dessus avec un fusil à pompe. Je vois alors un collègue, un colosse touché aux jambes par une rafale de plombs, baisser son bouclier et dégainer son pistolet. Puis, il a mis en joue le tireur quand ce dernier rechargeait son calibre. Même s’il était en état de légitime défense, je lui ai crié: « Range ton arme et protège-nous avec le bouclier! ». J’ai tout de suite pensé que s’il avait fait usage de son pistolet automatique,cela aurait été la catastrophe. Un mort, pour ne pas dire un martyr, aurait provoqué un embrasement dans les cités. Le type a donc tiré à nouveau et j’ai été atteinte par six plombs dans les jambes. Mes jambières étaient criblées d’impact. J’ai mal et risque de me faire opérer à nouveau. J’ai juste l’impression d’avoir fait mon métier.
Un simple et très rapide commentaire:
a) sur le principe et sur le coup, cette jeune personne a probablement bien fait.
b) il n’en demeure pas moins que c’est reculer pour mieux sauter: « on » ne pourra pas éternellement se faire blesser ou tuer, afin de ne surtout pas blesser ou tuer un assassin; il faudra bien, un jour ou l’autre, mettre hors d’état de nuire cette « armée » de plus en plus agressive et de mieux en mieux équipée. Préparons-nous…..
c) le 25 janvier, les gendarmes Philippe Regnier, Bertrand Boyer et le gendarme-adjoint Jérôme Bienfait, respectivement âgés de 25, 26 et 21 ans sont morts alors qu’ils cherchaient à porter secours au malfrat qu’il poursuivaient. Celui ci, « défavorablement connu des services de police » avait déjà été interpellé à plusieurs reprises, notamment pour des affaires de stupéfiants. Il roulait sans permis. L’un des trois militaires devait se marier cet été et les deux autres allaient devenir pères. Si leur acte d’héroïsme les honore, on peut cependant s’interroger: trois jeunes tués dans la fleur de l’âge par un voyou, est-ce bien raisonnable?…..
(1): « Le Figaro », samedi 1er – dimanche 2 décembre.
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