Alain de Benoist salué par Jacques Julliard dans Marianne ? Tout arrive…


Par Nicolas Gauthier

Cet article intéressant, partiellement surprenant par son sujet, intelligemment écrit, est paru, ce matin, dans Boulevard Voltaire. Nous suivons les écrits et les propos d’Alain de Benoist depuis bien longtemps et toujours avec profit, fût-ce sur des questions ou des domaines où nous ne partageons pas ses idées. À titre indicatif, signalons qu’Alain de Benoist sera l’invité du Cercle de Flore, le 10 de ce mois, au 10 rue Croix-des-Petits-Champs, Paris 1er. Sur le propos de Jacques Julliard, dans Marianne, nous aurons sans-doute à revenir. Notre pays décline gravement, tragiquement, mais les idées avancent. Leur conjonction avec un certain regain d’attachement à la France, un certain retour, si l’on veut, au nationalisme français, était l’espoir raisonnable de Charles Maurras, comme on doit le savoir. 

L’époque est, paraît-il, au dialogue et à la bienveillance. Peut-être. Mais jamais les Français – ou plutôt ceux qui font profession de penser pour eux – n’auront autant refusé toute forme de dialogue contradictoire, tout en professant une malveillance affichée. Pour résumer, la vulgate dominante nous dit : on ne parle pas avec ces gens-là et, pis, ils n’ont pas le droit de parler, puisqu’ils ne partagent pas nos « valeurs ». « Valeurs » de « dialogue » et de « bienveillance », il va de soi. Bref, à gauche, on ne débat presque plus qu’entre personnes du même avis ; soit l’exact contraire du débat.

Ces « gens-là », ce sont évidemment ceux de droite ou tenus pour tels, à l’instar d’, l’un des fondateurs du GRECE (Groupe de recherche et d’études sur la civilisation européenne), intellectuel pour le moins inclassable et bien connu de nos lecteurs. Pourtant, à l’approche de Pâques, il n’est pas interdit de croire aux miracles, la preuve par le dernier éditorial de Jacques Julliard, transfuge du Nouvel Observateur ayant demandé l’asile politique à Marianne.

L’article commence fort : «  est, avec Pierre-André Taguieff et Michel Onfray, un des trois intellectuels français à publier en moyenne deux à trois livres par an, sans bâcler ni sans vraiment se répéter. » Il est vrai qu’on ne saurait en dire autant d’un Bernard-Henri Lévy ou d’un Jacques Attali. Et notre audacieux de poursuivre : « En raison de l’hégémonie actuelle de la gauche dans le domaine des idées,  est assurément un des grands intellectuels les plus méconnus de notre temps. Il a l’élégance de ne pas s’en plaindre. » Peu de choses à ajouter à cet aimable portrait.

Le meilleur vient après : « J’ai toujours remarqué que l’extrême droite est moins de droite que la droite modérée, malgré les apparences. Pourquoi ? Parce que, le plus souvent, l’extrême droite privilégie les idées, tandis que la droite modérée privilégie toujours les intérêts. » Ces mots peuvent paraître énigmatiques, mais ils sont lourds de sens. S’il fallait résumer le paradoxe, il ne serait pas incongru de remonter à François Fillon et à sa candidature à l’élection présidentielle de 2017. Là, une certaine « extrême droite » lui apporte ses idées, catholiques et conservatrices, dont il se fait le héraut plus ou moins consentant. Mais, au soir du premier tour, le candidat malheureux appelle à voter pour Emmanuel Macron contre Marine Le Pen, alors que le ministère de l’Intérieur n’a même pas rendu les résultats officiels. Une fois encore, les intérêts réels auront eu raison des idées supposées.

Tout cela,  l’analyse mieux que bien. Tout comme il sait qu’Alain de Benoist, qu’il a lu, lui, au moins, ne correspond pas tout à fait avec l’idée que l’on peut se faire d’un penseur de droite, puisqu’il se sent en meilleure compagnie avec « Joseph Proudhon, la Commune ou Georges Sorel » qu’avec les traditionnels « Robert Brasillach et Joseph de Maistre ». Ce n’était un secret pour personne, mais il est élégant de le reconnaître.

Au téléphone, le principal intéressé nous confie : «  est un homme d’une grande honnêteté intellectuelle. Théoricien de la nouvelle gauche, sociale-démocrate, ce n’est pas pour rien qu’il a été celui de la CFDT. Il est tout aussi proche que moi de Georges Sorel, l’homme du syndicalisme révolutionnaire, ce qui nous fait un point commun dont il est très agréable de discuter lors de nos déjeuners ou dîners pris en privé. »

Cela n’empêche pas le même  de mettre en exergue les désaccords qui l’opposent à Alain de Benoist : son anti-universalisme, principalement, même s’il salue sa rigoureuse critique du « néoracialisme identitaire », si en vogue dans nos universités.  nous confie : « Tout cela est éminemment logique.  est universaliste parce que chrétien. Mais chrétien, je ne suis pas. Le tout consiste seulement à avoir encore le droit d’en débattre. »

et Alain de Benoist montrent l’exemple. On attend les suivants.  ■  

Journaliste à Boulevard Voltaire, écrivain

 

Rappel….

 

 

 

 

13 commentaires pour “Alain de Benoist salué par Jacques Julliard dans Marianne ? Tout arrive…

  1. Très assurément, cher Grégoire Legrand, pour peu que, bel et bien, vous ne fussiez pas thaïlandais…
    Quant à moi – pendant qu’on y est –, contrairement à Alain de Benoist, et ce, depuis toujours, je me sens en la meilleure des compagnies avec Robert Brasillach et Joseph de Maistre, tout inélégant que ce puisse sembler à telle gentaille…
    Pour dire la vérité, je me rappelle bien avoir, d’ailleurs, lu un bout de texte dans lequel Alain de Benoist déclarait sincèrement, soit, ne jamais avoir été de droite, ou bien, avoir toujours été de gauche – j’ai oublié la tournure, mais le sens y est.
    Cela permet de bien situer la «Nouvelle droite» (qui se disait ainsi donc pourtant bien de droite, ou je mange mon vieillot chapeau), à peine un peu plus à gauche que le national-socialisme ; si Jacques Julliard avait pris soin de lire aussi bien Rosenberg et consort qu’il semble avoir déchiffré de Benoist, peut-être comprendrait-il tout ce qui unit la gigantesque gauche, à laquelle il appartient, tout autant que ses plus ou moins semblables Robert Faurisson et autres – d’ailleurs, plutôt sympathiques – gaillards de La Vieille Taupe, entre mille z’exemples.

  2. Sans doute, sans doute. Mais je n’ai tout de même pas oublié les combats que nous avons mené contre l’idéologie d' »Europe-Action », dont Alain de Benoist – qui arborait le pseudonyme de Fabrice Laroche – était une des têtes pensantes. Idéologie racialiste, admirative du national-socialisme, de prétendues « valeurs blanches » et d’un paganisme niais qui adorait des druides allant cueillir du gui dans des chênes.

    Il paraît qu’il a mis de l’eau dans son vin – disons plutôt dans son hydromel – et qu’il faille donner à tout pécheur miséricorde.

    Il paraît qu’il a une immense bibliothèque. Voilà un bon point.

  3. @Pierre+Builly et @David+Gattegno

    Entendons-nous bien : je n’ai rien contre AdB (sauf son racialisme passé, si tant est qu’il l’eût jamais professé). Je trouve que c’est un homme très cultivé et bien plus respectable que la plupart des intellectuels médiatiques d’aujourd’hui.
    La seule chose que je dis, c’est qu’il n’est pas de droite. Il n’est d’ailleurs pas de gauche non plus, du moins le dit-il. Il prétend unir les deux si j’ai bien compris.
    C’est un projet discutable. Mais quelqu’un qui révère Proudhon ne peut être totalement mauvais.

  4. Pierre Builly a tout dit…
    Ce que représentent des gens comme Alain de Benoist et Pierre-André Taguieff, c’est que, qu’ils fussent apparus à ce que l’on appelle de manière erronée «l’extrême-droite» ou, plus justement «la gauche» (extrême ou non, dans la «gauche» il n’y a que «radicalité», comme ils disent), ces gens-là représentent la coterie mentale qui répugne à la réelle sincérité…
    Quand Pierre Builly se rappelle Europe-Action et «Fabrice Laroche», moi, je me rappelle le terne étudiant qui fréquentait les libraires «d’extrême-droite», en catimini, comme le petit bourgeois érotomane et misogyne hante les sex-shops, terne étudiant irrésistiblement attiré par ce qu’il était censé détester, exactement comme Fabrice Laroche vibrillonnait intérireurement lorsque les Camelots du Roi y allaient de la canne plombée contre les pseudo païens mitigés de cuir et de faux collets montés, indéfectibles frérots des anticléricaux rendus lubriques à ce qu’ils aimaient croire être l’évolienne idée de bizarres magies, exactement comme, en ce moment béni de Fin des Temps, on entend faire des bonnes femmes de méchants mectons et transhumer les homos.
    Il y a une vulgarité du mental, exactement assimilable à la pornographie, la seule différence tient à ce que chacune fréquente ses propres salles de projection, mais on y voit de mêmes navets : «Salo ou les 120 journées…» de Pasolini (Dieu lui pardonne!), «Exhibition» de Jean-François Davy (qu’il aille en Enfer!), «Flesh» de Paul Morissey et Wharol (j’sais p’us où qu’i’ s’met l’h), les undergrounderies sataniques à la Crowley ou certaines des saletés profondes de Polanski (quoique «Frantik» !…) et Woody Allen…
    Grégoire Legrand me pardonne d’avoir piétiné les plates bandes de son juste et bénin commentaire ; il doit se montrer indulgent avec la vieillerie me vieillissant chaque jour plus gravement.

  5. Quelques lignes de l(‘introduction à »Vu de Droite » d’Alain de Benoist (page 17) – éditions
    « La source d’Or » 1978 :
    « On a dit que les mots-clés du vocabulaire droitier avaient été discrédités par les fascismes .
    Disons plutôt que ce discrédit a été savamment crée et entretenu par les factions expertes
    dans la diffusion des mythes incapacitants et culpabilisants.Il faut être net à ce propos .
    Nous ne sommes pas ici en présence d’une analyse , mais d’une propagande . »
    Et cetera .

    Le ton est donné à cette « Anthologie critique des idées contemporaines »
    En prés de 600 pages , l’on va « Des racines de la civilisation » à  » Le modèle chinois » en
    passant par « Les équivoques de l’idéologie » .
    C’est un peu trop simple de réduire A.de Benoist au néo-paganisme ! (Comme Maurras à son « antisémitisme » ?)
    Est ce à la Gauche d’imposer ses mots d’ordre ?

    l

  6. Le GRECE s’e réduit tout seul comme un grand à cela… Ne pas oublier que l’admission au GRECE passait par une cérémonie pagano-ridicule, dans laquelle il y avait recours à une espèce de rituel passablement parodique et explicitement anti-chrétien. En effet, il ne faut pas les réduire au seul néo-paganisme, mais, surtout et principalement, à leur antichristianisme, quelquefois apoplectique. Et ce n’est pas parce que, en toute politesse et amitié sincère, Alain de Benoist entretient des liens étroits avec l’abbé de Tanoüarn, que cela change quoi que ce soit aux réalités doctrinales. Il n’est pas question de savoir si, «humainement», les uns et les autres peuvent être sympathiques, si, mentalement, ils se montrent à peu près d’aplomb, mais, comme il s’agit de gens qui écrivent et qui entendent livrer leur pensée au public, savoir donc comment ils écrivent et en quoi consistent ce qu’ils pensent. De Benoist pense indécrottablement athée et son «néo-paganisme» n’est, en fait, qu’une façade, établie pour dissimuler son matérialisme cartésien. Sans doute René Descartes était-il sympathique homme, mais ce n’est pas le réduire que de déplorer que son rationalisme eût tant et plus fait florès, sauf naturellement à nourrir soi-même des accointances avec athéisme, paganisme, peu ou prou -néo, ou cartésianisme ; ce qui n’est pas défendu, certes, comme il n’est pas davantage défendu de tenir tout cela pour cogitativement négligeable.
    Je me rappelle un cher ami, un peu «extrémiste», à coup sûr, qui, dans les années soixante-dix, lorsque je lui vantait le plaisir que j’avais à causer avec les gens de «Nouvelle école», m’avait fait valoir ceci : «Les gars de“Nouvelle École”, ce sont des universitaires qui, un beau jour, se sont aperçu qu’ils pouvaient se payer un cornet de frites au coin de la rue ; et ça leur a tourné la tête.» À l’époque, cela m’avait semblé un peu rude… Maintenant, ce me semble frappé au coin d’un bon sens quasi chestertonéen.

  7. D’accord avec David, se défausser sur Joseph de Maistre le grand analsyte de la Révolution et l’écrivian Btasillach,-certainemùent pas fait pour la politique- mais quel talent d’écriture , ne me paraît pas de bon augure. Le projet socialiste invoqué par Julliard ne peut servir de médiation si sympathique que soit Proudhon par ailleurs.

  8. Si l’ on reprend les propos d’ A. de Benoist , dans l’introduction de JSF , il n’est nullement question d’ athéisme voire d’ antichristianisme : « Jacques Julliard est universaliste parce que chrétien . Mais chrétien, je ne suis pas . »
    Ni plus , ni moins .

    (c’est tout de même étonnant : reproche -t-on à Eric Zemmour de n’être pas chrétien ?
    Et il y a mieux : tous les « Je suis Charlie » qui ferment les yeux sur les caricatures immondes de Benoit XVI, de Jean Paul II, qui étaient bien visibles sur les présentoirs des marchands de journaux au lieu d’être remisés derrière le comptoir .)
    Sans compter Macron ancien élève des écoles catholiques et dont l’esprit est complètement « pourri » .

    Il faut enfin noter, pour terminer, que si les catholiques (pratiquants ou non) défendaient la monarchie avec autant de zèle que les royalistes défendent la religion, la Royauté, en France serait rétablie depuis longtemps . Etrange , cette dissymétrie .

  9. L’antichristianisme de la «Nouvelle droite» ne tient pas seulement à se définir comme n’étant pas chrétien, mais bel et bien en ce que les idées nourries éprouvent une détestation maladive du christianisme et, plus généralement, du monothéisme, en général. J’imagine que cela repose sur une lecture adolescente, et jamais dégrossie ensuite, de Nietzsche, mais aussi, et c’est plus profond, sur la dimension d’un matérialisme dialectique dans lequel la notion de «lumpenprolétariat» a trouvé à s’alimenter en bien des sortes de contrées très mal fréquentées, un peu comme, mais à l’inverse, Bertold Brecht a cru trouver de la nourriture «dialectique» dans la Chine ancienne (voir «Maître Puntila et son valet Mati», entre autres). Je crois que le GRECE avait appelé l’ensemble de la procédure «gramciste de droite».
    Quant au fait que les chrétiens puissent ne pas être royalistes alors que le royalisme vanterait l’Église, c’est aller trop vite en besogne que d’en déduire une explication de l’éloignement du Royaume dans les perspectives politiques, quoique, pour ma part, je me désole bel et bien de la dyssymétrie, en réalité, imputable à la dégénérescence «humaniste» de la doctrine de l’Église et à la déclinaison conséquente de ses ouailles.

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